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05/01/2013

Le dortoir des tourterelles

Elles sont toutes là.

Toutes les tourterelles de la vallée se sont rassemblées sur l’arbre qui se dresse au milieu du champ labouré. Elles se reposent au soleil dans le calme de cet après-midi hivernal.

 

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L'arbre aux tourterelles, Turquie

 

L’arbre qui les héberge a perdu ses feuilles mais d’énormes boules de gui prolifèrent sur ses branches. Il est bien vieux cet arbre que le laboureur a préservé au milieu de son champ. Regardez-le : son tronc est creusé de profondes craquelures causées par le gel de l’hiver et les fortes chaleurs de l’été. Il tient bon depuis des décennies, seul au milieu de nulle part. Derrière lui s’élève une colline rocailleuse qui le protège du vent d’est. Mais quand le vent vient du nord, rien à faire, le vieil arbre est secoué et ses branches s’agitent dans tous les sens.

Cet après-midi, le vent s’est tu après avoir chassé les nuages porteurs de pluie. Et les tourterelles prennent leur bain de soleil. Kotoko, qui a quitté depuis quelques jours la plage aux tortues d’Iztuzu, aimerait bien trouver un endroit calme pour se reposer. Il a très peur de la grand-route qui longe le champ labouré : de gros camions y circulent ainsi que des autocars, des camionnettes et des voitures. Les routes sont dangereuses pour les hérissons et  Kotoko s’en méfie. Quand il aperçoit le vieil arbre, il s’en approche et découvre petit à petit les tourterelles qui se prélassent au soleil. Il aimerait faire comme elles.

 

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Les tourterelles dans leur dortoir à l'approche de Kotoko

 

La tourterelle guetteuse, qui surveille les environs pour permettre à ses amies de dormir tranquillement, aperçoit Kotoko qui s’approche. Elle commence immédiatement à s’agiter et à roucouler pour alerter ses amies de l’arrivée d’un animal inconnu. Kotoko aimerait grimper dans cet arbre et somnoler aux côté des oiseaux. Quand il s’arrête au pied du tronc d’arbre, une grande agitation règne au sein de la troupe des tourterelles. Le silence de la sieste est rompu et ce ne sont que « crous crous » d’alarme qui répondent à des « crous crous » d’inquiétude. Kotoko ne se décourage pas pour autant et lance à la guetteuse qui le surveille quelques mots aimables :

-          Bonjour mademoiselle la tourterelle ! Que vous êtes belle ! Vos plumes brillent au soleil et votre chant ravit mes oreilles.

-          « Crou crou » roucoule la guetteuse, flattée qu’un hérisson lui envoie d’aussi aimables compliments. Comment t’appelles-tu ? Porc-épic ?

-          Non, non, je ne suis pas un porc-épic. Je suis un hérisson et je viens du Ghana.

-          « Crou crou » reprend la tourterelle. Le Ghana se trouve bien loin de notre pays, la Turquie. Tu es le bienvenu car tu es un grand voyageur. Monte dans le vieil arbre et viens te reposer avec nous. Nous n’avons pas peur de toi, tu es notre ami.

-          Venez m’aider. Je ne sais pas grimper aux arbres.

Quelques tourterelles descendent de leurs branches et se posent délicatement près de Kotoko. Elles le placent sur leur dos et le soulèvent en battant des ailes. Arrivées au creux de branche le plus douillet, elles déposent délicatement Kotoko au soleil. Salué par de nombreux « crous crous » de bienvenue, Kotoko remercie ses amies ailées et ne tarde pas à s’endormir tant il est fatigué. Les tourterelles reprennent elles aussi leur sieste en veillant sur leur nouvel ami venu de si loin.

 

19/12/2012

Kotoko et la tortue Daylan

« Si on savait quelque chose de ce qu’on va écrire, avant de le faire, avant d’écrire, on n’écrirait jamais. Ce ne serait pas la peine. »

Écrire, Marguerite Duras, 1993

 

 

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La lagune du fleuve Dalaman et la montagne où Kotoko se retrouve (Turquie)

 

Kotoko ne sait pas trop comment il se retrouve en Turquie mais il y est bel et bien. Dans ce pays aux mille montagnes, il se réveille au sommet d’un mont de plus de mille mètres d’altitude qui plonge dans la mer Méditerranée. Sous l’effet des rayons du soleil qui se lève, la montagne sort de l’obscurité et prend sa forme abrupte, dressée comme un bouclier face au large et aux envahisseurs qui pourraient surgir des flots.

Kotoko est bien embarrassé : le sommet de la montagne est dénué de toute nourriture et aucun point d’eau ne peut désaltérer notre ami. Le hérisson se dit qu’il ne pourra pas rester longtemps sur cette hauteur inhospitalière. Certes la vue est magnifique sur l’estuaire du fleuve Dalaman qui serpente en méandres paresseux jusqu’à la mer. Encadré de hautes falaises abruptes, bordé par des roselières impraticables sur des kilomètres, le Dalaman rejoint la Méditerranée en traversant la plage d’Iztuzu.

Tout cela est bien joli mais un paysage, aussi beau soit-il, n’a jamais nourri un hérisson. Kotoko ne peut pas se contenter du plaisir des yeux. Il lui faut de bonnes fourmis sous la dent et quelques vers sur la langue.  

En s’approchant du précipice qui plonge jusqu’à la lagune du fleuve Dalaman, Kotoko est pris de vertige. Il sent que sa tête tourne, de plus en plus fort. Il perd l’équilibre et sans s’en rendre compte, il bascule dans le vide et commence à glisser le long de la paroi rocheuse. Heureusement pour lui, il n’est pas lourd, ses épines épaisses amortissent les chocs et des arbustes et des buissons qui poussent dans les creux de rochers ralentissent sa chute. Kotoko croit rêver ou plutôt vivre un cauchemar. Il n’a pas le temps de se demander dans quel état il va se retrouver au pied de la montagne qu’il se sent plonger dans une eau salvatrice. Il se retrouve au fond de la lagune et il n’y voit pas grand-chose tant l’eau est trouble.

Kotoko ne sait pas nager et il est très inquiet : comment va-t-il se sortir de ce mauvais pas ? Comment va-t-il échapper à la noyade ?

Serions-nous à la fin des aventures de Kotoko ?

 

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La tortue Daylan et son sortège de poissons (lagune du Dalaman, Turquie)

 

Non. Car, nageant entre deux eaux à très grande vitesse grâce à ses quatre pattes, une grosse tortue s’approche de Kotoko. Elle s’appelle Daylan et vit dans la lagune du fleuve Dalaman. Elle a vu Kotoko tomber dans l’eau comme un petit astéroïde. Et elle a plongé à sa recherche sachant que les hérissons ne savent pas nager. Kotoko, en plein désespoir, sent soudain qu’une force solide le soulève. Daylan l’a chargé sur sa carapace et remonte le plus vite possible vers la surface pour que Kotoko puisse respirer. Et c’est enfin la lumière et avec elle l’air qui manquait tant à Kotoko. Nos deux amis se trouvent au bord de la roselière et Kotoko halète en reprenant son souffle.

Quand il peut enfin parler, il dit à la tortue  Daylan:

-          Merci, tortue, tu m’as sauvé la vie. Sans toi, je me serais noyé !

-          C’est normal de s’aider entre animaux. Je n’allais pas te laisser couler dans les eaux sombres du Dalaman. Comment t’appelles-tu et comment es-tu tombé dans l’eau ?

-          Je m’appelle Kotoko,  je viens du Ghana. Je ne sais pas du tout par quel sortilège je me suis retrouvé au sommet de cette montagne que tu vois au-dessus de nous. J’en suis tombé et par miracle je suis arrivé vivant dans la lagune !

-          Un sortilège ? Comme dans les contes des Mille et une nuits ?

-          Je sais que je peux grâce aux grilles magiques voyager rapidement. Mais là, c’est nouveau, j’étais au Ghana et l’instant d’après en Turquie, sur cette montagne !

-          Tu sais Kotoko, il ne faut pas chercher à tout comprendre. Tu es vivant et entier, c’est l’essentiel et nous t’accueillons avec plaisir, nous les tortues d’Iztuzu. Nous venons sur la plage pondre nos œufs avant de repartir vers le large. Moi je suis la gardienne des lieux, je m’appelle Daylan et je vis ici toute l’année.

-          Encore merci tortue Daylan. Tu sais, je viens de boire l’eau du fleuve qui est un peu salée mais j’ai toujours très faim…

-          Alors en avant ! Monte sur ma carapace et filons vers la plage. Tu y trouveras des puces des sables absolument délicieuses ! Et tu pourras goûter au crabe bleu, encore meilleur.

Et nos deux amis filèrent vers la plage d’Iztuzu. Ils croisèrent quelques bateaux, pour certains chargés de touristes. Les passagers furent étonnés de voir un hérisson voyager sur la carapace d’une tortue. Était-ce un sortilège ?

 

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La plage d'Iztuzu (Turquie)